Définition de l'inconscient chez Freud
Publié le 29 Décembre 2013
Remarque préliminaire
Pour les élèves de terminale, la découverte de la théorie freudienne est la plupart du temps fascinante. mais ils commettent souvent la maladresse dans les dissertations de philosophie, de se lancer dans des exposés très techniques de la doctrine de Freud.
Ce n’est pas ce que l’on attend en philosophie. Bien sûr il est nécessaire de connaître les fondamentaux de cette théorie. Mais dans une dissertation de philosophie, il s’agit avant tout d’utiliser les résultats de la psychanalyse pour montrer comment ce champ disciplinaire révolutionne la pensée de l’homme (que ce soit sur le plan de la nature humaine, de son rapport à sa conscience, dans sa conception du désir, sur le plan de la morale, sur le plan des origines de la culture, de son besoin de religion….etc.). C'est pour cela que notre présentation sera pour l'instant assez succincte.
Le concept freudien d’inconscient
LIEN : Film : John Huston - Freud, passions secrètes
A voir - le film présente l'élaboration de la "première topique" freudienne fondée sur la double découverte de l'inconscient et de la sexualité infantile.
La découverte de l’inconscient se fait sur le terrain de l’étude de l’hystérie.
Définition : L’inconscient n’est pas une « conscience obscure » c’est-à-dire qu’il ne consiste pas en des souvenirs enfouis qui auraient cessé de faire l’objet d’une visée intentionnelle de la conscience, mais qui seraient susceptibles d’être actualisés. Ce n’est pas une conscience souterraine, atténuée, qui resterait cependant en continuité avec la conscience claire. L’inconscient n’est pas davantage de la mauvaise foi ou un mensonge à soi-même par lequel le sujet refuserait de reconnaître comme sien ce qui lui appartient en propre et se masquerait à lui-même ce refus.
Pour Freud le terme d’inconscient désigne des processus psychiques spécifiques, qualitativement différents des processus conscients. Il n’y a donc pas de continuité mais une coupure radicale avec la conscience.
L’inconscient peut se définir très généralement comme l’ensemble des représentations refoulées par le moi parce qu’elles sont incompatibles avec les valeurs « morales » du surmoi[1].
Il faut souligner que le refoulement n’est jamais un fait d’observation. Aucune introspection ne peut l’atteindre. Le concept de refoulement est une production théorique motivée par le besoin d’expliquer les phénomènes psychiques qui se manifestent dans l’hystérie et dans son traitement.
De même l’inconscient n’est jamais perçu. C’est un concept créé pour rendre compte de l’efficience de souvenirs disparus de la mémoire.
L’inconscient n’est pas un lieu dans le psychisme mais un ensemble de forces pulsionnelles. Pour en comprendre le fonctionnement il est nécessaire d’en avoir une représentation dynamique : les représentations inconscientes refoulées ne sont jamais « oubliées ». Obéissant au principe de plaisir elles recherchent toujours une satisfaction totale. De ce fait mêmes refoulées, elles continuent à exercer sur le psychisme une pression.
Pour passer la barrière de la censure, ces pulsions refoulées se déguisent afin que la conscience ne les reconnaisse pas. Elles trouvent alors une satisfaction partielle dans les symptômes observés dans les névroses (l'hystérique souffre des résidus de ces affects), mais aussi dans des manifestations banales telles que les rêves, les actes manqués ou les attachements affectifs que nous éprouvons à l’égard d’objets, d’activités, de personnes.
Penser le sujet : les apports de la psychanalyse
La psychanalyse permet désormais de comprendre des phénomènes (les symptômes, les rêves…) qui restaient jusqu’alors incompréhensibles tant qu’on identifiait le psychisme à la conscience. Elle permet à l’homme de gagner en intelligibilité.
Mais la découverte de l’inconscient conduit à un profond remaniement de la notion de sujet. Désormais il est impossible d’identifier le sujet à la conscience de soi comme le faisait la tradition philosophique depuis Descartes.
Le psychisme de l’homme ne peut plus se réduire, comme le pensait Descartes, à une conscience de soi parfaitement transparente à elle-même. Le sujet est constitué à la fois d’une conscience et d’un inconscient, lequel contient beaucoup plus de représentations que la conscience.
Comme le souligne Freud « le moi n’est pas maître dans sa propre maison » et « il en est réduit à se contenter de renseignement rares et fragmentaires sur ce qui se passe en dehors de sa conscience, dans sa vie psychique » (Introduction à la psychanalyse, Freud).
On ne peut plus faire de la conscience le fondement de la certitude comme le faisait Descartes : la conscience (le « moi ») ne sait pas la plupart du temps ce qui se passe dans sa « maison » (le psychisme) ; elle ignore ce qu’elle a refoulé et ne peut le retrouver que de manière partielle, par exemple en interprétant les rêves, les lapsus, les actes manqués.
Il faut également abandonner l’idée d’une unité du sujet. Le sujet est radicalement divisé entre sa conscience et son inconscient. Dans la seconde formulation de sa théorie Freud ira jusqu’à distinguer trois parties du psychisme humain : le ça, la Moi, le Surmoi.
La psychanalyse nous conduit à abandonner l’idée d’un sujet libre et maître de lui-même. Le sujet est influencé par ses représentations inconscientes, c’est-à-dire par des représentations qui sont en lui sans qu’il les connaisse. Il est à la fois déterminé par ses pulsions et par les interdits qu’il a intériorisé dans le Surmoi.
A partir de Freud, la notion de sujet n’apparaît plus que comme une fiction ou une illusion qui permet de donner une unité à des processus disparates. Ce qui amène certains philosophes à penser que l’on pourrait désormais se passer de cette notion pour comprendre l’homme, son histoire, ses comportements. Par exemple le philosophe Louis Althusser (XX° siècle) propose, dans le sillage de Karl Marx (XIX°) que l’on pense désormais l’homme en termes de forces de productions ou de forces sociales.
[1] L’élaboration de la théorie freudienne de l’appareil psychique se fait en deux temps. La première construction théorique reposait essentiellement sur la division du psychisme inconscient/ conscient.
Dans la deuxième présentation de l’appareil psychique (connue sous le nom de « seconde topique »), Freud distingue trois instances : le Ça, le Moi et le Surmoi.
● Le Ça est constitué par l’ensemble des forces pulsionnelles les plus primitives provenant du corps et constituant l’être humain. Le Ça est régi par le principe de plaisir. Cela veut dire que la logique des pulsions est de rechercher une satisfaction immédiate par n’importe quel moyen.
● Le Moi est en relation avec le monde extérieur. Il est l’intermédiaire entre le Ça et la réalité. Il a pour fonction l’adaptation de l’individu à son environnement. Il sélectionne les pulsions, il gère leur accomplissement en leur proposant dans le monde extérieur des objets de satisfaction, ou alors il refoule en refoulant les désirs inacceptables Dans le Moi coexiste des fonctions conscientes et des fonctions inconscientes.
● Le Surmoi est l’intériorisation par l’enfant de l’autorité paternelle (« tu dois…). Cette instance est à la fois porteuse d’interdits, mais elle possède aussi une dimension positive et protectrice, indispensable au bon développement de l’individu.
Mots clés : inconscient, Ça, Moi, Surmoi